Archive for mars, 2015
Idées fausses sur l’action non-violente
by pwll on Mar.28, 2015, under Débats, Général
J’entends beaucoup de choses sur la violence, la non-violence, la possibilité d’amener les flics « de notre côté » ou les signes de peace dans les manifs. Je ne suis pas une experte de la question, mais je constate qu’il y a une masse de personnes qui ont envie de penser à ces enjeux. De la même manière, je pense que c’est très contre-productif de lever le nez sur des idées que les gens expriment juste parce qu’ils disent « non-violence ». J’ai donc pris la liberté de traduire et d’adapter une partie d’un livre appellé Unarmed Insurrections. People Power Movements in Nondemocracies pour élargir la discussion.
Ce texte ne s’adresse ni à des gens qui trouvent que c’est une bonne idée de faire des câlins à des flics et qui veulent les convaincre « d’être de notre côté », ni à des gens qui ne sont pas capable de voir que les tactiques utilisées par nos mouvements sont majoritairement non-violentes (grèves générales, blocages, occupations…), mais s’adresse plutôt à des gens qui constatent que la diversité des tactiques est essentielle à un mouvement social qui se veut large, inclusif et qui sait que tout mouvement social progressif et anti-oppressif est en opposition avec l’ordre établi.
Source : Kurt Schock, Unarmed Insurrections. People Power Movements in Nondemocracies, University of Minnesota Press, Minneapolis, 2005, p. 6-12.
Voici 19 des idées fausses les plus communes à propos de la non-violence :
1- L’action non-violente n’est pas l’inaction (même si ça peut inclure le refus de porter une action qui est attendue par les oppresseurs), ce n’est pas de la soumission, ce n’est pas l’évitement du conflit et ce n’est pas se résigner de manière passive. Dans les faits, l’action non-violente est un moyen direct pour poursuivre le conflit avec les opposants et est un rejet sans équivoque de l’inaction, de la soumission et de la passivité.
2- Tout ce qui est non-violent n’est pas considéré comme de l’action non-violente. L’action non-violente réfère à des actions spécifiques qui sont risquées et impliquent de la pression non-violente ou des moyens de coercition non-violents dans des interactions conflictuelles entre deux groupes opposés.
3- L’action non-violente n’est pas limitée à des activités politiques sanctionnées par l’État. L’action non-violente peut-être légale ou illégale. La désobéissance civile est une violation délibérée de la loi dans un but social ou politique et est un mode d’action non-violent fondamental.
4- L’action non-violente n’est pas composé d’actions politiques régulées ou institutionnalisées comme écrire des lettres, voter ou faire du lobbying. Contrairement au cas des gens qui s’engagent dans des actions politiques régulées et institutionnalisées, il y a toujours un élément de risque pour les gens qui choisissent l’action non-violente car elle défie les autorités.
5- L’action non-violente n’est pas une forme de négociation ou de compromis. La négociation et le compromis peuvent ou non accompagner les conflits poursuivis par l’action non-violente comme ils peuvent ou non accompagner l’action violente. En d’autres mots, l’action non-violente est un moyen de poursuivre un conflit et doit être distingué d’un moyen de résolution du conflit.
6- L’action non-violente ne dépend pas de l’autorité morale, de la honte des opposants, ou de la conversion de leur point de vue pour promouvoir un changement politique. Si la conversion du point de vue des opposants peut des fois arriver, le plus souvent l’action non-violente promeut le changement politique au travers la coercicion non-violente qui force l’opposant à faire des changements en lui sapant son pouvoir. Bien sûr, la pression morale peut être mobilisée, mais en l’absence de pressions politiques et économique il est improbable qu’un changement se produise.
7- Les gens qui utilisent l’action non-violente ne s’attendent pas à ce que l’État ne réagisse pas avec violence. La réaction violente du gouvernement n’est pas une indication de l’échec de l’action non-violente. En fait, les gouvernements répondent avec violence précisément parce que l’action non-violente est une menace pour leur pouvoir. Éliminer l’utilisation de l’action non-violente parce que des gens meurent ou sont blessés est tout aussi illogique que d’éliminer l’utilisation de résistance armée parce que des gens meurent et sont blessés. Lutte non-violente ne veut pas dire une absence de violence.
8- Ceci étant dit, la souffrance n’est pas une part essentielle de la résistance non-violente. La vision de la souffrance comme étant centrale à la résistance non-violente est basée sur la fausse assomption que l’action non-violente est de la résistance passive et qu’elle essaie de produire du changement en essayant de convaincre les oppresseurs. L’action non-violente est beaucoup plus sophistiquée que la fausse conception qui illustre l’image des activistes acceptant la violence physique des agents de leurs oppresseurs dans l’espoir que leur souffrance va convertir les opposants ou gagner la sympathie publique.
9- L’action non-violente n’est pas une méthode qui s’utilise seulement en dernier recourt, quand les moyens violents ne sont pas disponibles. Comme l’action violente peut être utilisée même quand il n’y a pas d’armes disponibles, l’action non-violente peut aussi être utilisée à la place de méthodes violentes.
10- L’action non-violente n’est pas une méthode d’action politique « bourgeoise » ou « classe moyenne ». Des actions non-violentes ont été, et peuvent être, mises en œuvre par toutes les classes, des esclaves jusqu’aux classes élevées. Pour des raisons évidentes, elles sont utilisées par les gens qui ont le moins de pouvoir, des gens qui n’ont pas accès au pouvoir, plus fréquemment que par des gens en position de pouvoir.
11- L’usage de l’action non-violente n’est pas limitée à la poursuites de but « réformistes » ou « modérés ». Il peut également être utilisé pour atteindre des buts « radicaux ». Par exemple, Anders Corr a documenté l’usage étendu de la non-violence dans les luttes pour la terre et le logement à travers le monde. Les défis au relations découlant de la propriété privée peuvent difficilement être considérées réformistes, modérés ou bourgeoises. De la même manière, le mouvement féministe a défié de manière radicale les rapports patriarcaux presque entièrement par des méthodes qui n’incluaient pas la violence. Les défis à l’ordre établi peuvent être radicaux et non-violents.
12- Si par sa nature même l’action non-violente requiert de la patience, ça ne veut pas dire que la production de changement politique sera lente en soi comparé à l’action violente. Des luttes violentes qui ont servi de modèle pour des générations de révolutionnaires ont pu prendre des décennies pour réussir.
13- Les moyens de l’action non-violente ne sont pas structurellement déterminés. Il y a des relations dans le temps et l’espace entre les contextes politiques et l’usage d’une stratégie, mais les méthodes utilisées pour défier des rapports politiques oppressifs ne sont pas déterminés par le contexte politique. Des processus d’apprentissage, de diffusion et de changements sociaux peuvent conduire à l’instauration d’actions non-violentes dans des contextes ou situations qui ont historiquement été caractérisés par des conflits violents. Certainement, le contexte des conflits et les enjeux influencent les stratégies de résistance, mais pas d’une manière déterministe.
14- L’efficacité de l’action non-violente n’est pas liée à l’idéologie des oppresseurs. Les croyances des oppresseurs peuvent influencer les dynamiques du conflit, mais elles ne sont pas uniquement ce qui détermine les aboutissants des luttes menées au travers de méthodes d’actions non-violentes.
15- De manière similaire, l’efficacité de l’action non-violente n’est pas en fonction de la répression des oppresseurs. Des campagnes d’action non-violente ont été efficaces dans des contextes répressifs brutaux et inefficaces dans des contexte de démocratie plus ouverte. La répression, bien sûr, contraint l’habilité à s’organiser, à communiquer, à mobiliser et à s’engager dans l’action collective et élargit les risques à participer à des actions collectives. Néanmoins, la répression est seulement un des facteurs qui influencent les trajectoires des luttes basées sur l’action non-violente.
16- La mobilisation de masse de gens dans des campagnes d’actions non-violentes dans des contextes dit «non-démocratiques » ne dépend pas de l’obligation qu’ont les gens à y participer. Si des campagnes d’actions non-violentes ont inclus la coercition pour mobiliser, la coercition n’est pas une caractéristique des mobilisations de masse. Des exemples démontrent que quand les communautés étaient vivement divisées ou que les campagnes n’étaient pas assez publicisées la coercition avait plus de risques d’être utilisé. Au contraire, quand des solidarités étaient construites entre les communautés et que les gens étaient bien au courant des campagnes, la coercition avait le moins de chance d’arriver.
17- Contrairement aux idées populaires et universitaires, les personnes qui décident de s’engager dans l’action non-violente sont rarement des pacifistes. Les personnes qui s’engagent dans l’action non-violente ont différentes idées, dont le pacifisme peut faire partie, mais le pacifisme n’est pas ce qui ressort chez les gens qui font le choix de l’action non-violente.
18- De manière similaire, les gens qui s’engagent dans l’action non-violente n’ont pas à savoir que c’est ce qu’ils font. Ainsi, l’implantation de méthodes non-violentes ne sont pas nécessairement reconnues comme « non-violentes » par les gens qui les pratiquent et ces personnes n’ont certainement pas à adhérer à une théorie de la non-violence ou à un code moral pour réussir et diffuser leurs stratégies.
19- Les campagnes d’actions non-violentes n’ont pas besoin d’un leader charismatique pour réussir même si certaines en ont eu. En fait, elles n’ont pas besoin du tout de leaders.
Austerity and Social Strike in Quebec
by La Tomate noire on Mar.26, 2015, under Général
What is Austerity? Austerity is the new buzz word, mostly because it is used as a mobilization tool in the preparation of Quebec’s next student strike that is also calling for a larger social strike. What is happening now, where is this new crisis is coming from, and what can we expect from it? These are some questions I will try to briefly address in this presentation.
So really, what is Austerity?
The neoliberal ideology in Quebec’s state and public services was implanted in the early 1990s. Recently, the rate at which these transformations have been introduced has greatly accelerated : cuts in education, cuts in the health sector, cuts in public sector employees pensions (Bill 3), etc. The Government of Quebec presented austerity measures as inevitable for the collective good: everyone had to do their part and take responsibility. However, austerity can be better understood as a set of measures that are enacted locally according to neoliberal philosophy, as well as a political choice from a specific social class. Therefore, austerity will not affect everyone in the same way. Its objective can be understood as an attempt to sabotage social infrastructures in order to progressively privatize the state and its subsidiaries.
Neoliberalism is a widely discussed topic. However, I will just define it as a political philosophy that slowly imposed itself as a new hegemony, rooted in an economic and managerial rationality, in which everything is to be understood and managed as a private company or a market. While the thinkers of neoliberalism are calling for a more “responsabilized citizen”, Wendy Brown (2006) argues that it creates rather a “depoliticized citizen”, by transforming political problems into personal problems with market solutions and by producing a consumer-citizen available to a heavy degree of governance and authority. David Harvey (2010) also argued that we have entered a new phase of capital accumulation which he called “accumulation by depossession”. According to Harvey, this accumulation (gaining plus-value) does not come from lands or work force, but from the upper classes that take back what social movements had won in previous struggles, whether it be welfare, labour regulations or other social protection. Hence, “austerity” can’t be understood without a class struggle paradigm.
Student strike and social strike
Quebec has a long and very rich history of social movements organizing against government decisions, starting with the labour movements in the 19th century, and the organization of a student movement somewhere in between the end of the fifties. To understand the particularity of social movements in Quebec, one has to understand the concept of “syndicalisme de combat”, a term that has no official English translation. I will therefore use “combative unionism”, a term coined by Jean-Marc Piotte in 1977 (Piotte, 1977). Combative unionism is a mix between orthodox Marxism and anarcho-syndicalism and is in opposition to corporate unionism and business unionism. I will not enter into details, but the major differences are in the ideology, objectives and means used by those different kinds of unions. Whereas the corporate and business unions want to protect the corporate and individual rights of the worker and are organized in a top-down hierarchy, combative unionism inserts itself in a logic of class struggle and works towards the creation of a “power relation” against the bosses who exploit their workers. This kind of organization requires direct democracy and a bottom-up organization, and uses strikes and direct actions as legitimate political means to fight back.
However, in Quebec, the labour movement is not talking about combative unionism anymore. Only a certain fringe of the student and community worker’s movement does. This is largely due to the fact that since the 1980’s, there has been a major weakening of syndicalism. To survive, unions have had to transition towards a syndicalism of consultation, that works hand in hand with the government and the management (Rouillard, 2004). This transition was caused by the major economic recession of the 1980s, the creation of the Law on essential measures and the transformation of the Labour Code in 1999, which regulated the right to strike. Direct democracy doesn’t really exist anymore and struggles are bracketed by the cycle of collective labour agreements.
The stronger political movement is the student movement, because students have the power to organize political strikes in the realm of education, but also in solidarity with other struggles, based on a strong combative union structure. This is possible because the “right to strike” is not legislated in the student context. Students say they are legitimate to strike because they are intellectual workers (a concept that comes from May 68 in France) and are inside the society, not outside, so they can act in it. This spring, students organized a general strike against the government’s austerity measures, not only against cuts in education, but also against cuts in the health and public sector, and against hydrocarbure extraction projects. The momentum was chosen because the public sector workers’ collective labour agreements are ending on the 1st of April, which means a social strike is more possible than ever. A large coalition in favor of a one day social strike on May 1st (the traditional day against capitalism), has also been organized by the Industrial Workers of the World (IWW), gathering students, labour unions and community groups. Presently, the student movement is quite divided, because there is a wide variety of student federations. On the one side, there are the reformist and corporate student federations (FECQ and FEUQ). On the other, there is ASSÉ, a direct democracy national student union using combative unionism, and then there is the new Printemps 2015 group. Printemps 2015 started as an anti-austerity UQAM informal mobilization squad. The group was composed of, amongst others, former ASSÉ activists who didn’t recognized themselves in the post-strike 2012 ASSÉ, which became larger, more centralized and media oriented. It called for the creation of various autonomous and informal “printemps 2015 committees” everywhere, to start mobilizing for the strike autonomously.
What is happening at Concordia and in our department?
Francophones and anglophones have very different cultures and traditions of organization that have most of the time evolved separately because of the language barrier. While French associations developed a student unionism with a strong culture of general assemblies and direct democracy, anglophone student activism related less on their material conditions as students and more on identity struggles and affinity groups. For example, they have focused more on queer, intersectional, anti-oppression and anti-racist struggles. The structure of the student association in Concordia for example, is very similar to the Student Government in the United States. It is also historically situated and reflects the aftermath of the Netanyahou riots at Concordia in 2002 (see the movie Discordia for more info). There may be less of a strike or GA culture at Concordia, but it is not as if it was easy or taken for granted in francophone association either. In 2012, we started doing mobilization in favour of a strike 2 years before. It is a collective and transformative process.
Since a few years, we saw many exchanges happening (from both sides). In 2012, Concordia joined the student strike and multiple associations affiliated to ASSÉ. Since the fall, an inter-departmental group “Solidarity Concordia” joined to raise awareness against austerity measures and in favour of a strike. At this date, at least 5 student association voted for a strike (either March the 23rd and/or April 2nd), summing about 4000 students. Another 10 000 will be voting soon. In Québec so far, approximately 80 000 students will be on strike across the province, including renewable general strike mandates or punctual strikes.
Role of the student strike
This is what leads us to the impact or importance of a student strike in Quebec. Even if I believe that strikes and direct action are the only way that we can have any real impact in relation to government decisions, I don’t think that the major force of a strike lies in its potential “gain”. It is more about the opening of possibilities that it creates, the gathering of people that exchange on the world and politicize themselves. It changes how we relate to and behave in the world. This leads us to another important question that is whether or not we should have demands. The development of the rhetoric of “social rights” comes from 19th century social movements and is linked to the creation of a “civil society”, which is defined by the domain of social life organized independently from the state. That implies a definition of society as a functioning whole, but is that really the case? Eric Wolf (2001) warned us about this use of an all-encompassing concept. Society is not a functioning whole. It is rather crossed by structural and hierarchical relations of power. The function of “demands” are then to create a compromise and to obtain and stabilize our privileges given by the state and “social peace”. However, as multiple subaltern studies scholars such as Chakrabarty have shown, the “we are all born equal” liberal citizen concept doesn’t exist. Hence, recognition, as Povinelli puts it (2011), is bracketed inside the structure of “late liberalism” and its lines of (in) tolerance and its social division and hierarchies. That means that it is always linked to the liberal dynamics of making live, making die and letting die, which unfolds dynamics of endurance and survival. So what if we didn’t want to contribute to the liberal society anymore? Could there be other ways of imagining our role and responsibilities towards others and other ways of conceptualizing the dynamics of reproduction of power and solidarities? The idea of “the commons” (Federici, 2011) seems to be a very insightful way of rethinking our relations to each other and to the state, rather than the “social” whose role in the end is to contribute to the reproduction of the liberal capitalist system.
Role of the intellectual and the anthropologist
So what is the role of intellectuals, anthropologists and sociologists? Should we contribute to society? A common answer would be yes: we want to have an impact, and we believe that the production of knowledge could enlighten people and change the world for the better, even in small bits. In anthropology, we like to put an emphasis on what people do rather than what people say they do. So I would like to turn back the focus and to “objectify the objectivator”, as Bourdieu (1984) would put it.
We are not born scholars, we become scholars (in a very painful process) hence the scholar we are is rooted in who we were (and still are) and our social position in the field, but also desires, aspiration, fears, and angers. Our political rationality or scientific interest are not merely rational and individual choices. Some say; “I am a scholar, I do my job, I do scholarly things”. This might be true, but we are not outside the world, we never were. Hence, we are not just scholars or students. We are horrified by extractivism, work conditions, structural oppression like sexism, racism (name it!), and this is what brought us to school in the first place, to understand. And then what, what are we doing, what is our role? The problem is that whatever knowledge or critique we can produce as academics and scholars, it’s going to be used to make the system more efficient (Boltanski & Chiapello, 1999). Capitalism is well-known for absorbing critiques in an utilitarist way. Just as it is engaged in a process of endless and exponential accumulation, it is engaged in a process of continuous amelioration. The thing is that time is not linear nor evolutionary, and that resources are not unlimited.
Juliah Oparah (2014), a scholar and one of Angela Davis’s comrades, tells us that we have to materially help and engage with activists and insurgents, and not just build ourselves careers on the back of those who puts their bodies at risk. The spectacle of violence and conflict is another kind of exoticism. Let’s take the example of Alain Bertho (2009) , a French sociologist who studies riots around the world through the internet, from the comfort of his office. That fascination for the end of the world and riots, that other called “réalisme catastrophile”, has risen up with the augmentation of discontent and uprisings in the 90s, in reaction with the increase of neoliberal policies. Are we voyeurs? Which side are we on? Are we going to be taking part in the action or are we just going to write about it? Riots do convey a message though with their symbolism, but they are not performances, they are an appeal.
Then yes, academics have a specific role and there is a value to the production of knowledge, and this takes time and care. But in the end, who are we benefitting? Who are we useful to? Who are we relating to? My intent here is not to make a call for a programmatic activist anthropology. I do suggest that scholars will have to put their hands in the dirt, and not just when and how they choose it, with carefully framed relations inscribed in their research design. The field is never ending, there are no boundaries in reality. Both what we consider “going on the field” and our “day to day” life informs and shapes the way we understand reality and what’s out there. And we will probably be more useful in our own communities if we decide to take an active role in it. That requires going out there, meeting people, making friends, entering in difficult social processes and sometimes making mistakes, but this is what we would do in the field anyway. That’s fascinating, because I am part of two communities that are constantly worried about being “outside of the world” and to be invisible to the ‘common mortals’. When did you ever stop being a common mortal? There is a movement of back and forth between theory and practice and theory is not always symbolic violence, when it is embodied it can be emancipatory. That means making time for this, because it is an impossible task if we stay in the “budget-time” (Bourdieu, 1984) structure defined for young graduate scholar and students. This time can be liberated by striking, but on a day to day basis, it could also be obtained by “slowing down” or even by leaving academia. However, we don’t need super-activists: those people are often more damageable than helpful because it doesn’t contribute to the creation of inclusive spaces. While struggling against capitalism and its effects, we should also try to deconstruct the capitalist socialization that forces us to be always more performant selves.
Conclusion: What can we hope for? Why are we doing this?
Povinelli (2011) says that hope is dangerous, and instead of hoping for a better future, we should get into the material world, with care, and try to do something. This is not something that can be thought, it is something that has to be lived. Strikes are not always easy, nor fun. They can be pretty dangerous: there are physical, affective and legal consequences. However, there are those small moments where you understand that you are not just a ‘ressource’ or a number, and that when joining with others, you can have a real political power. Whether it’s when you spend hours deciding on a motion in a general assembly and that you make it happen by picketing the classes so that you can go to a demonstration, or when you successfully unarrest-bizarre- a comrade at a demo… You leave the discursive realm of ideas and you realize that collectively you have an impact in the material world. This experience is life-changing, and I invite you to take part in this process in the weeks to come.
For more infos: grevesociale.info
– written by MT.
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REFERENCES
Bertho, A. (2009). Le temps des émeutes. Montrouge: Bayard.
Boltanski, L., & Chiapello, E. (1999). Le nouvel esprit du capitalisme. Paris: Gallimard.
Federici, S. (2011). Feminism and the Politics of the Commons. na. Retrieved from http://www.andandand.org/pdf/federici_feminism_politics_commons.pdf
Harvey, D. (2010). A companion to Marx’s Capital (Vol. 1). Verso Books.
Pierre Bourdieu. (1984). Homo Academicus. Paris: Éditions de Minuit.
Piotte, J.-M. (1977). Un syndicalisme de combat. Montréal: Editions A. St-Martin.
Piya Chatterjee, S. M. (Ed.). (2014). The Imperial University: Academic Repression and Scholarly Dissent. Minneapolis: University of Minnesota Press.
Povinelli, E. A. (2011). Economies of abandonment: social belonging and endurance in late liberalism. Duke University Press Durham, NC.
Rouillard, J. (2004). Le Syndicalisme Québécois. Montréal: Les Éditions du Boréal.
Wolf, E. R., & Silverman, S. (2001). Pathways of power building an anthropology of the modern world. Berkeley: University of California Press. Retrieved from http://site.ebrary.com/id/10057112
PEGIDA : racisme islamophobe et sexisme
by pwll on Mar.25, 2015, under féminisme, Général
Le samedi 28 mars PEGIDA Québec se réunira pour sa « Première action » à Montréal, en plein « Petit Maghreb ». PEGIDA est un mouvement d’origine allemande (Patriotische Europäer gegen die Islamisierung des Abendlandes – Patriotes européens contre l’islamisation de l’occident) qui a inspiré un pendant québécois qui pue autant. Des deux côtés de l’océan, PEGIDA se nourrit au racisme et encourage la stigmatisation et l’exclusion des personnes musulmanes en utilisant un discours alarmiste qui oppose une civilisation occidentale supposément laïque, moderne et progressive contre l’imaginaire du musulman barbare dont les femmes sont toujours captives et violentées. Le mouvement PEGIDA est aussi porteur d’idées fascisantes. Par ces appels à l’imaginaire identitaire de la nation accompagnés d’un discours qui rejette et stigmatise les musulman-e-s, PEGIDA encourage le découpage de la société en différentes communautés qui ne devraient pas avoir les même droits.
Au niveau global, ces idées s’inscrivent dans une période où le militarisme occidental légitimise une guerre invisible contre le « terrorisme ». Guerre invisible pour nous, mais qui tue de manière impitoyable des milliers de personnes dont la majorité écrasante sont des civil-e-s. Guerre qui contribue également à la stigmatisation des personnes musulmanes qui vivent en occident. Ces idées se placent aussi dans un contexte de crise sociale et de politiques d’austérité ce qui augmente l’insécurité sociale et les tensions. Au Québec, le gouvernement libéral alimente les inégalités sociales déjà existantes pendant que certains partis politiques profitent du repli nationaliste identitaire pour lancer des appels populistes et irresponsables en participant activement à l’idée que les musulman-e-s sont dangereux. Ainsi, l’État participe à la construction du racisme et du sexisme ambiant en ciblant particulièrement les femmes dans la sphère publique (tout en prétendant « les aider à se libérer ») et en faisant des séparations constantes entre « eux » et « nous ».
L’islamophobie est le racisme qui vise les personnes de religion musulmane (où même des personnes « ayant l’air » musulmanes). Sous le couvert d’un attachement à l’égalité, à la liberté d’expression et à la laïcité, PEGIDA Québec, comme les autres mouvements PEGIDA en Europe, est un repère d’idées islamophobes qui ont des conséquences réelles graves pour les conditions de vie, l’autonomie, l’accès aux services, et la sécurité des musulman-e-s.
Quelques chiffres :
De janvier 2013 à octobre 2013 le Collectif Québécois Contre l’Islamophobie (CQCI) a reçu 142 plaintes pour des actes et des propos islamophobes au Québec. Sur ces 142 cas au moins 114 des victimes étaient de femmes.
Les femmes musulmanes représentent 84,4% des victimes d’actes islamophobes et les femmes portant le foulard représentent 77% des victimes d’agressions physiques ou verbales selon le rapport annuel de 2013 du Collectif contre l’islamophobie en France.
Une des conséquences très concrète de la montée de l’islamophobie sont ces agressions de femmes. Elles sont agressées pour deux raisons indissociables : parce qu’elles sont musulmanes et parce qu’elles sont des femmes. La montée de l’islamophobie banalise les violences vécues par les personnes de religion musulmane et banalise leur exclusion.
En tant que féministe, je pense qu’un outil important pour l’émancipation des femmes est la capacité à faire des choix et je crois que donner des choix aux femmes en misant sur l’égalité des chances dans la société (éducation accessible, emplois accessibles, logements accessibles, le choix d’avoir ou non des enfants, le choix de comment s’habiller, le choix d’avec qui on veut partager de l’intimité…) et beaucoup plus porteur d’une égalité que la pseudo laïcité violente que les islamophobes réclament.
Je refuse de toutes mes forces que des femmes subissent de la violence parce qu’elles sont des femmes et parce qu’elles sont musulmanes. Je suis en solidarité avec elles, avec leurs familles et leurs proches. Je refuse également que le féminisme serve à faire valoir des pensées fascisantes basées sur l’exclusion et la violence.
NON À PEGIDA, AU QUÉBEC ET PARTOUT AUTOUR DU MONDE! NON À L’ISLAMOPHOBIE!
À samedi tout le monde!
Rassemblement contre le racisme et l’islamophobie
Samedi 28 mars 15:30
Coin pie IX/Bélair
L’empreinte: Redéfinir les mythes nationaux et appropriation culturelle
by Umzidiu Meiktok on Mar.19, 2015, under Général
(Merci à I. Ce texte est le résultat de la discussion que nous avons eue au retour du visionnement.)
Quand j’ai assisté pour la dernière fois à une activité du PQ il y a une décennie environ (une conférence de Louis Bernard)[1], une clameur s’était élevée dans la salle suite à l’énonciation de l’histoire de l’identité canadienne-française. Une vieille dame pleine d’amertume avait même grogné en parlant des «méchants Anglais»: « Ils nous ont volé nos symboles et notre hymne national ». C’était une tendance assez forte à l’époque que de donner dans cette victimisation larmoyante. Un groupe d’intérêt avait même été fondé dans l’espoir de reprendre au ROC le nom de Canada et l’emblème de la feuille d’érable.
Que des nationalistes québécois-es jugent bon, aujourd’hui, de récupérer non pas quelques symboles, mais de revendiquer des identités entières aux peuples autochtones, ça ne semble cependant pas causer tant de chemises déchirées.
De fait, cette tendance n’est pas apparue avec le documentaire L’Empreinte. Depuis qu’il n’est plus exactement honteux de s’identifier comme d’origine autochtone, des Nords-Américain-e-s de tout poil prétendent avoir du « sang indien » bien caché quelque part dans le coin d’une veine. Dans ce contexte, les Québécois-es ne font d’ailleurs absolument pas exception. La tendance peut être plus forte qu’ailleurs à se définir comme société métissée (clairement moins que dans à peu près toute l’Amérique latine, quand même) mais elle s’inscrit dans une tradition qui n’est pas du tout unique[2] et cela n’a sans doute rien à voir, contrairement à ce que Darryl Leroux croit, avec les larmes acides que bien des Québécois-es versent sur leur propre sort. Bien évidemment, la génétique nous a appris que les Québécois-es de vieille souche française ont assez peu de vrai « sang indien », mais passons, cela importe en fait assez peu.
La thèse de L’Empreinte, en regard de tout ça, est particulièrement laborieuse à résumer. Le documentaire cherche à démontrer qu’à peu près tout ce qui constitue le «modèle québécois» est un héritage de la culture amérindienne. Place de la femme, valeurs égalitaires, social-démocratie, tolérance, recherche du consensus, etc. Tout y passe. Même en outrepassant toute logique et en admettant une influence directe aussi forte, on pourrait bien arguer que cela ne fait pas de nous des Amérindien-ne-s et ne nous donne pas le droit de revendiquer ce statut. Pas plus que les emprunts constants des Grecs/ques Ancien-ne-s aux autres civilisations n’ont fait d’eux des Phénicien-ne-s ou des Égyptien-ne-s. Mais il n’y a rien à faire. Roy Dupuis le sent en lui qu’il est « indien ». Ses invité-e-s, confortablement installé-e-s dans des chalets à 400 000$ ou des bureaux luxueux, le sentent aussi. Une psychanalyste invitée et visiblement intéressée par l’ésotérisme en arrive à dire que la négation même de l’héritage autochtone (dans l’expression « on est pas des sauvages ») est une preuve de plus qu’en réalité, on est des sauvages.
Légendes dorées, légendes noires
Le Québec ne se distingue pas non plus sur le soin qu’il met à présenter la colonisation comme étant dénuée de tout conflit. Aux États-Unis, on présente souvent l’image des bons puritains portant des chapeaux haut-de-forme partager du blé d’Inde lors du « Premier Thanksgiving ». La France, encore culturellement forte au Maghreb, a édicté des lois mémorielles. En Espagne, la leyenda negra est une expression péjorative qui renvoie aux histoires d’exactions commises durant, notamment, la colonisation de l’Amérique et prétendument inventées de toutes pièces pour des motifs politiques[3]. Devant tant de récits nationaux lavés à l’eau de javel, il serait surprenant que le «nôtre» soit le seul, le seul au monde pour reprendre la théorie du documentaire, à avoir été fondamentalement différent.
Non, le Québec n’est pas unique. Les vertus de sa colonisation non plus, ni ses exactions. Sur le plan historique, L’Empreinte est exsangue. La meilleure parodie vient d’ailleurs de Denys Delâge et de Serge Bouchard, deux spécialistes qui connaissent pourtant très bien le poids des mots. On ne se centre que sur les alliances entre Français-es et Autochtones, qui ont effectivement eu lieu. Mais des alliances, pratiquement tous les colonisateurs en ont tissé, même le cruel Cortès, destructeur des Aztèques.
On met bien sûr de côté la masse pourtant incontournable des bavures, qui date de bien avant l’hostie de Conquête: le rôle français dans l’extermination des Renards par exemple, l’évangélisation agressive et la traite massive de milliers d’esclaves (surtout des Autochtones mais aussi des Africain-e-s), et dont le fameux Jean Vauquelin, héros couronné par une place attenante à l’Hôtel de Ville de Montréal, était friand. On a beau, assez ridiculement d’ailleurs, évacuer toute responsabilité sur ce qui s’est passé après 1759 – ce sont finalement les Anglais qui seraient responsables de la cassure entre Québécois-es et Autochtones – il n’en reste pas moins que des massacres, les Français qui s’appelaient Canadiens en ont aussi commis.
Et je ne souscris pas à la thèse du « moins pire ». Un esclavage « moins pire » centré sur la domesticité est tout de même de l’esclavage, et mérite d’être appelé « esclavage » et non « modèle unique de colonisation ».
Ignorance et idéalisation
Dans ce documentaire sur les valeurs autochtones supposément transmises aux Québécois-es, on ne parle finalement pas du tout des Autochtones. Les informations sur la culture des différentes nations présentes au Québec tombent au compte-gouttes, les plus exactes semblant d’ailleurs provenir de Joséphine Bacon, chez qui Roy Dupuis remarque immédiatement les yeux, anormalement bleus. Cette discussion, qui démontre finalement que les Québécois-es sont redevables aux Autochtones (et non pas qu’illes sont autochtones), est présentée comme l’indéniable preuve que ces dernières/iers reconnaissent eux-mêmes la proximité.
Assez délicieusement, la poétesse innue remarque d’ailleurs que si la conversation avait eu lieu dans sa langue, certaines questions auraient été de trop. Sous-entendu: ta yeule Roy.
L’histoire réelle passe le relai au mythe du bon sauvage. Celui d’une Île de la Tortue (autrement dit l’Amérique) idéalisée et dans laquelle tous les individus étaient égaux, solidaires et libres. Le fait est: s’il est vrai que les Jésuites et Gabriel Sagard ont effectivement observé des traits plus égalitaires et une liberté sexuelle plus grande chez les Autochtones visités, il n’en reste pas moins que la vision générale qu’en ont eu les Européens par la suite n’a rien à voir avec la réalité historique. Il est né d’une instrumentalisation des Autochtones à des fins philosophiques, politiques et idéologiques: ce phénomène existe depuis longtemps et représente tous les indigènes du monde sous des traits juvéniles et purs. Pas étonnant qu’on traite encore les Autochtones comme des mineur-e-s, pourrait-on en conclure.
Autrefois on se servait du mythe du bon sauvage pour vanter une culture ignorant le péché et dénoncer le progrès. Dans l’Empreinte, le péché c’est l’individualisme. Dans les faits, nous savons très bien que les Premières Nations du Québec sont issues de civilisations développées, matures et aux normes parfois strictes (incluant sur le plan des rôles genrés, remarquerait Gabriel Sagard). L’ignorer au profit du mythe, comme on le fait ici, est une négation totale du vécu des Autochtones, de leurs luttes quotidiennes pour améliorer leur vie, de leurs questionnements, de leurs doutes. Toutes ces choses qui nous permettent de les considérer justement comme nos pareils, c’est-à-dire des êtres humains dignes d’être nos interlocuteurs/trices.
De qui a-t-on hérité?
On pourrait affirmer que l’esprit communautaire des Québécois-es (en admettant qu’il soit aussi distinct qu’on le prétend) existait déjà dans la France du Moyen Âge. On pourrait aussi affirmer que le mépris apparent pour la hiérarchie (traditionnelle) est commun en Amérique du Nord, et qu’il n’a pas nécessairement de racines autochtones, et que c’est l’Américanité du Québec qui s’exprime à travers lui. On pourrait affirmer que le dédain pour la richesse, dont parle Roy Dupuis, est en fait une invention de Joseph Facal servant à victimiser les bourgeois-es, et que par ailleurs le premier discours contre les riches (et qui nous a été transmis) date de l’Égypte ancienne et non pas de la gaugauche immobiliste. Que la social-démocratie est réellement héritée d’Europe, (genre… l’endroit où elle a été inventée). Que notre système d’éducation mêle les inspirations catholiques et socioconstructivistes, aussi originaires d’Europe.
Mais au lieu de chercher des vérités multiples un peu partout, le documentaire affirme que tout ça vient du fait que nos ancêtres gambadaient gaiement, main dans la main avec des Autochtones, au milieu de la Vallée du Saint-Laurent. C’est commode et confortable comme théorie.
« Fuck les Indien-ne-s, vive la social-démocratie! »
Qui l’eût cru: le modèle québécois « capitaliste à visage humain » comme me le faisait remarquer I., découlerait directement de la vie communale (sans État ni capitalisme) des Algonquin-e-s et Huron-ne-s. La gauche modérée n’est pas la première à s’essayer de récupérer ce récit de colons. J’ai déjà entendu Michel Kelly-Gagnon, alors président du Conseil du Patronat, tenter de vendre le capitalisme sauvage en incitant ses compatriotes à « retrouver l’esprit du coureur des bois ». Il avait fait de ce thème une conférence et de sa conférence une tournée pan-québécoise.
Mais ce qui me met hors de moi, c’est que ce maudit documentaire n’amènera jamais une seule réaction de solidarité face aux luttes autochtones, ou même de sympathie à leur égard. On n’y parle ni des territoires accaparés, ni des forêts rasées, ni des femmes disparues, ni des réussites multiples, ni des espoirs, ni même du quotidien. On ne voit même pas l’ombre d’une rue de Pikogan ou d’Odanak. Son objectif est de défendre le modèle québécois (blanc) par un immense appel à la tradition (imaginaire et nourrie par l’anecdote), stratégie plagiée aux esprits ultraconservateurs. Dans ce contexte, et même si quelques intervenant-e-s issu-e-s des Premières Nations sont utilisé-e-s[4], les principaux/ales intéressé-e-s sont évacué-e-s et restent des remarquables oublié-e-s.
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[1] Notons par ailleurs que pendant cet évènement, j’ai été hué (pour la dernière fois par le PQ) après avoir posé une question sur le droit à l’autodétermination des Autochtones à M. Bernard. À la défense de l’ex «Grand Mandarin», il a dit avoir visité les communautés à plusieurs reprises, et compris leur désir: c’est-à-dire celui de se gouverner eux-mêmes. Il n’y avait pas de mépris dans cette réponse.
[2] Par exemple, chez les Blancs et les Noir-e-s des USA, la tendance est également forte, comme l’illustre le début de ce texte: « I AM COLORED but I offer nothing in the way of extenuating circumstances except the fact that I am the only Negro in the United States whose grandfather on the mother’s side was not an Indian chief.»
[3] Il est possible de dire que l’Espagne a réellement été victime d’une légende noire – des mensonges ont été colportés sans arrêt dans le cadre d’une guerre de propagande- mais ironiquement, plusieurs historien-ne-s nationalistes se sont servi-e-s de l’existence de ce biais pour discréditer toutes les critiques. Ici on parle plutôt de «Québec bashing», mais c’est littéralement le même phénomène, avec son lot de réactions stupides de part et d’autre.
[4] Et cela ne constitue absolument pas une critique de leur participation au documentaire.
Les 15 mars se suivent… et ne se ressemblent pas toujours
by pwll on Mar.16, 2015, under Général
En fait je dis ça, mais je ne parle pas pour tout le monde. Pour beaucoup de gens malheureusement, le 15 mars a encore fini avec un ticket (l’article 500.1) après une attente interminable dans la slush frette, pris en souricière par le SPVM équipé pour aller en guerre.
Récapitulons :
Je suis passée au rassemblement du COBP coin Berri/Ontario un peu avant 15h. Il y avait déjà au moins 8 fois le nombre de flics que de personnes qui voulaient se réunir pour dénoncer la brutalité policière : des poussins, des antiémeutes, des autos, des vans, allouette! Je suis restée quelques minutes puis j’ai pris le chemin de la manif féministe où j’avais décidé d’aller cette année. Surprise! Plein de gens contre la brutalité policière, mais une seule voiture de flic sur le côté de la Place Philip.
C’est n’importe quoi! Des gens au SPVM prennent des décisions complètement arbitraires et sont payé-e-s et récompensé-e-s pour ça (moi aussi des fois j’ai envie de crier « mes taxes! »). La manif féministe était affichée comme une « manif contre la brutalité policière » et n’a pas donné son trajet. Le rassemblement du COBP était affiché comme un rassemblement, donc n’a pas à donner son trajet. Que les flics prennent un plaisir dégoûtant à s’habiller en GI Joe pour aller réprimer du monde pas armé, pas équipé en nous faisant croire que c’est parce que « la manif n’a pas donné son itinéraire » pour finalement l’arrêter pour cause d’« action concertée destinée à entraver la circulation des véhicules routiers » (Criss c’est 2 articles différents! Nous prenez-vous pour des caves?!) est encore une preuve à placer dans la grande liste de « les flics font ce qu’y veulent quand y veulent pis APRÈS y trouvent un article pour se justifier ».
Le rassemblement pour la manif féministe était agréable, plein de gens différents, de ballons et j’ai vu quelques enfants. J’ai aussi eu l’agréable surprise de voir une bannière abolitionniste (mais wtf la barre du A en Kalachnikov?!), ça m’a surpris parce qu’on n’entend pas les abolos dans la gauche radicale (gauche radicale ou juste gauche comme nous le faisaient remarquer deux filles de l’industrie il y a quelques mois). Juste avant le départ de la manif, un groupe qui s’était tenu en retrait du reste des gens a décidé de ne pas faire partie de la manifestation et a crié que c’était à cause de la bannière abolo. Je me suis fait le commentaire que je n’avais jamais assisté au départ de gens à cause de malaises causés par la position abolitionniste pendant que j’ai assisté à beaucoup de départs à cause de l’inverse. Pourtant gang il va bien falloir trouver un moyen de se parler un jour, ça serait dommage de laisser les lignes de la CLÉ et de Stella diriger nos réflexions féministes et nos choix d’alliances dans la gauche radicale.
Nous avons donc pris la rue! Oui oui! La rue!
Je souligne ici l’absurdité totale de vivre dans un « État de droit » qui se gargarise aux mots « droits fondamentaux » et « Constitution » et de se rendre compte que maintenant, à chaque fois que nous décidons de prendre la rue de la même manière que les manifs l’ont fait des années durant, on s’expose à de la violence et de la répression policière.
On a marché sur Ste-Catherine jusqu’à St-Laurent puis monté St-Laurent vers le Nord. C’était très libérateur de crier « FLICS, MACHISTES, ASSASSINS! » en marchant. La manif était de bonne humeur, les gens étaient content-e-s de marcher. Wow on a marché presque une heure! Les flics nous suivaient en auto mais j’en ai pas vu beaucoup… On était très très loin de la gang à l’allure paramilitaire que j’avais vue coin Berri/Ontario. La manif s’est tout de même fait disperser près de la rue Rachel… Comme quoi… Mais je suis quand même plus qu’heureuse d’avoir été capable de marcher dans une manif féministe pour le 15 mars!
De retour vers la maison, en apprenant que le rassemblement du COBP était sur Berri (à 50 mètres d’où je les avais vus quelques heures auparavant!), pris en souricière, j’ai décidé de passer par là. Il y avait quelques personnes et quelques bannières. Les gens, même les gens qui ne faisaient que passer, étaient complètement renversés quand on leur racontait pourquoi les flics bloquaient le carré Sherbrooke-Ontario-Berri au complet, avec un armement et un équipement qui leur serait plus utile pour combattre Daesh en Syrie, mais qu’illes utilisaient pourtant pour mater un rassemblement pacifique.
Il y a eu quelques discours et des bannières. On a rit des flics et on a essayé de faire du bruit pour s’encourager et encourager la gang en bas. À moment donné la flicaille s’est tannée de nous et nous a poussé-e-s sur le trottoir en nous disant de nous en aller.
On a changé de bord de rue.
Les pieds mouillés, j’ai fini par partir, non sans plusieurs pensées pour les gens dans la souricière.
J’espère que vous allez bien.
NO JUSTICE NO PEACE, SMASH THE POLICE!
Faique y’a des fachos qui ont eu une tite peur pour leurs tis événements?
by pwll on Mar.02, 2015, under Général
En soirée, le groupe Légitime Violence et ses invités français In Memoriam ont tenu un concert dans un lieu tenu confidentiel, par crainte de perturbation par des militants antifascistes ou par la police. [1]
En matinée, ce sont «trois représentants» du groupe d’extrême droite italien Casapound et de son aile jeunesse Blocco studentesco qui donnaient une conférence publique à l’invitation de la Fédération des Québécois de souche (FQS) et du groupe La bannière noire. Là encore, les organisateurs n’ont pas révélé où aurait lieu leur évènement.
[Photos venant de la page fb de la Fédération des Québecois de souche]
Vous le savez que vous êtes watché-e-s. Vous le savez que des gens vont toujours s’interposer et vous gâcher votre fun de cracher votre marde d’extrême-droite. Ces idées d’exclusion, de haine, de hiérarchie et d’autorité, c’est juste non. La Fédération des Québécois de souche peut ben déguiser son fascisme sous un verni de traditions québécoises et d’inquiétudes pour la majorité et Légitime Violence peut ben chanter : « Ces petits gauchistes efféminés qui se permettent de nous critiquer n’oseront jamais nous affronter. On va tous les poignarder!», vous avez quand même besoin de passer par le bouche-à-oreille pour être sûr-e-s de réaliser vos événements. De la même manière, quand Légitime Violence « ne se qualifie pas publiquement de fasciste, mais plutôt d’«anti-antifasciste» », il n’y a personne de cave. Y’a pas juste vous qui savez que nous savons que dans le fond vous êtes des fascistes qui invitez des groupes fascistes, y’a le lectorat de La Presse en entier qui le sait. Vous trouvez sûrement que c’est un bon moment (austérité et appauvrissement qui vient avec, réflexe de repli identitaire des majoritaires qui se sentent « menacé-e-s » – De quoi? Ça reste un mystère -, contexte global d’islamophobie et de colonialisme néo-libéral) pour encourager les idées fascisantes, mais vous savez aussi que si vous vous montrez de manière décomplexée ça ne passera pas.
Vous allez toujours trouver des gens sur votre route.
En plus, Montréal a cela de très pratique que tout le monde se sent antifasciste dans la gauche radicale. Être antifasciste n’est pas une appellation tant contrôlée ici, même si des groupes et des personnes mettent (heureusement!) une énergie particulière à cette lutte. Donc, avec toute la gauche radicale qui se sent interpellée par les idées de marde que vous essayez de transmettre, ben vous faites bien de vous cantonner à des trous inconnus et de spinner votre marde entre vous.
Vous allez toujours trouver des gens ben motivé-e-s à vous barrer le chemin.
Pour nos archives :
In Memoriam les accompagnait sur scène, selon l’affiche du spectacle. Le groupe français est une figure historique du «rock identitaire français», un courant intimement lié à l’extrême droite.
Casapound «peut être qualifiée comme étant une organisation d’extrême droite de type fasciste, dans le sens que ses fondements idéologiques sont à retracer dans l’expérience du fascisme historique italien», a indiqué une spécialiste de la question, Caterina Froio, à La Presse. Mme Froio est chercheuse postdoctorale à l’Université Paris 2. «Le groupe a incorporé dans sa rhétorique des positions plus ouvertement xénophobes», a-t-elle ajouté.
[1] Toutes les citations sont prises dans l’article de La Presse L’extrême droite se réunit à Montréal publié le 2 mars 2015.